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l’Euro n’est pas irréversible

l’Euro n’est pas irréversible

Non, M. Mario Draghi, l’Euro n’est pas irréversible. Il est mortel!

Monsieur le Président,

En l’an 2000, votre prédécesseur, M. Jean-Claude Trichet (voir ses interviews de l’époque), nous expliquait que l’Euro allait permettre la convergence des économies Européennes, un développement des marches financiers, l’émergence d’une industrie bancaire pan européenne, une intégration plus poussée des affaires, une discipline budgétaire renforcée dans chaque pays, une croissance plus forte , une baisse du chômage, …..Un ciel plus bleu, une
température plus douce, des banquiers responsables, des auditeurs comptables courageux… 

Difficile de se tromper plus…

En effet 12 ans plus tard, que constatons-nous? :

Cinq pays Européens en quasi faillite (Grèce, Portugal, Espagne, Italie, Irlande) et qui n’ont plus accès aux marchés financiers à des conditions pérennes, pour la première fois dans l’histoire du vieux continent. 

  • Une véritable dépression économique en Espagne, en Italie, au Portugal, en Grèce, en Irlande, bientôt en France.
  • Des taux de chômage chez les jeunes à des niveaux record notamment en Italie (36.2%), au Portugal (36.4%), en Grèce (52.1%), en Espagne (52.1%), ce qui est une honte. Naturellement, ces jeunes quittent leur pays pour aller travailler en dehors d’Europe, tandis que les taux de chômage dans la population active atteignent des records sans exemple depuis les années 1930, notamment au Portugal (15.2%), en Espagne (24.6%), en Grèce (21,9% en mars 2012),
  • Un véritable écroulement de nos systèmes financiers, avec les cours boursiers des grandes banques européennes qui ont baissé de 60 % à 90% en trois ans sanctionnant la situation financière désespérée de ces institutions.  Un grand retour du nationalisme et des démagogues dans plusieurs pays (notamment en France, mais aussi en Grèce, au Pays-Bas, en Belgique, en Finlande, en Italie…..).Déjà, 18 Députés pronazis ont été élus en Grèce (6.92% des suffrages).

Bref, l’Euro a été aussi efficace que la célèbre ligne Maginot qui avait été soutenue, comme l’Euro aujourd’hui, par toutes les élites françaises de l’époque, à l’exception bien connue de Charles de Gaulle dont on peut être certain qu’il aurait refusé l’Euro.

De surcroit, l’acharnement thérapeutique de ce monstre financier va entrainer, dans un avenir proche, les trois désastres suivants :

La nomenklatura bruxelloise de technocrates nommés et non élus (donc sans légitimité populaire) pousse à la création d’un super-Etat Européen dans lequel l’étendue de ses pouvoirs sera sans cesse augmentée. Leur but est en effet de détruire l’Europe des Nations de Robert Schuman et d’Adenauer, en retirant la souveraineté budgétaire à chacun des pays pour la transférer à une élite (eux), élue par personne et en fait, contrôlée par personne. Bref, c’est
le rêve de tout technocrate. On notera d’ailleurs le glissement sémantique : « le transfert de souveraineté » est devenu « partage de souveraineté ». Comment peut-on partager sa souveraineté? Je donne ma langue au chat. Tout cela avait été parfaitement annoncé par bien des observateurs compétents, notamment par l’un des deux auteurs de cet article, Charles Gave dans son livre Des Lions menés par des Anes, (publié en 2002).En effet, il est vérifié que toute l’histoire économique montre que l’on ne peut maintenir dans un taux de change fixe, les monnaies de deux pays qui ont des productivités différentes, sauf si sont organisés des transferts financiers massifs des pays riches et productifs vers les pays pauvres et peu productifs. Bien entendu, les peuples productifs (Allemagne, Autriche, Hollande, Finlande) refusent ces transferts, mais la nomenklatura bruxelloise (qui ne paye pas ou peu d’impôts) les pressent de les accepter au nom de la “solidarité Européenne” qui n’a pas de sens. La solidarité s’exerce à l’intérieur d’une Nation. L’Europe n’est pas une Nation, mais une Civilisation chrétienne, ce qui est à la fois beaucoup plus et beaucoup moins. L’euro a été bâti en postulant que le politique l’emporterait toujours sur l’économique (Conclusion de M. Mario Draghi dans son interview au Monde du 22/23 juillet 2012). Or l’économique se venge toujours quand les lois économiques et la souveraineté populaire ne sont pas respectées par les politiques.

Les drames humains crées par l’Euro risque de détruire la zone de libre-échange des services et des biens qui existe en Europe. En effet, la dépression engendre le protectionnisme comme notamment pendant la crise de1929. Et le protectionnisme s’exercera en priorité aux dépens de ce qui a déjà été construit et fonctionne. Il est tout à fait certain que l’euro est en train de tuer l’Europe.

La dépression créée par l’Euro va légitimement engendrer la révolte des peuples de sa zone. Les peuples n’accepteront pas la perte de leur souveraineté budgétaire, première étape à une perte de souveraineté totale. Les troubles et émeutes se multiplient déjà en Grèce, en Espagne, au Portugal, en Italie. Il y a fort à parier qu’ils affecteront la France, à partir de l’automne 2012.

Notre nomenklatura non élue nous explique que les problèmes de l’Euro viendraient d’une seule cause: les gouvernements des pays en faillite (et de la France) auraient manqué à leur devoir en laissant filer les déficits publics pendant des décennies. De ce fait, ils doivent être “punis”. 

En fait, c’est l’inverse.

La création de l’Euro a permis à des gouvernements étatistes, excessivement dépensiers par essence, de s’endetter à des taux bas, c’est à dire allemands. L’euro a donc renforcé leur inclination naturelle à l’excès de dépenses publiques, ce qui les laisse dans une situation fort difficile aujourd’hui. Or, comme l’a tristement montré le gouvernement Laval en 1935, la dépression ne peut être traitée d’un coté par une hausse des impôts et d’un autre coté , par une baisse autoritaire ,des salaires des fonctionnaires , et des prix (de l’électricité, du gaz, notamment), et cela sans dévaluation. On ne sort pas de la dette et des déficits par la dépression. L’erreur a été faite en 1935, ne doublons pas la mise! La seule question qui doit être posée est donc la suivante. L’Euro est à l’évidence un désastre sans précédent, infligé par des élites ‘constructivistes” aux peuples Européens qui n’en demandaient pas tant. A quel moment ces “élites”, responsables de ces désastres vont elles demander pardon aux peuples européens ? “Pardon, nous vous avons trompés”! et/ ou
“Pardon, nous nous sommes trompés!”

En fait, il faut arrêter d’urgence l’hémorragie et retourner à des prix de marché pour les changes et les taux d’intérêt, supprimés depuis 12 ans, avec les résultats heureux que chacun peut constater aujourd’hui. En clair, revenir aux monnaies nationales. Ou faudra t- il attendre des émeutes, des guerres et des morts?
Et là, il sera trop tard!
L’Euro est une horreur économique politique, humaine.
Comme le dit le proverbe Allemand, ‘il vaut mieux la fin de l’Horreur qu’une Horreur sans fin”.
De grâce, arrêtons la folie tant qu’il est temps, pour sauver l’Europe que nous aimons.


Charles Gave, President de GaveKal Research
Didier Maréchal, Trésorier d’Alternative Libérale

Paris, le 30 juillet 2012

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